Monsieur l'Abbé Francis Poivrel, né en 1864 à Rennes, est oratorien de formation. Alors qu'il est vicaire à Saint Antoine des XV-XX, son curé, l'Abbé Rivière, lui demande de former un groupe d'hommes. Devant sa réussite, il l'engage à continuer en créant un patronage. Le patronage doit être l'endroit où "on joue et on prie", évitant ainsi aux jeunes de traîner dans la rue, en aidant les familles dans leur rôle éducatif;
Courant 1904 une Vente de Charité permet de réunir les premiers fonds pour louer un terrain constitué principalement d'un ancien entrepôt de bois, aux confins de la paroisse entre la Gare de Lyon et la Seine. C'est ainsi qu'en décembre 1905, une trentaine d'enfants sont réunis autour d'un sapin de Noël. Le coup d'envoi est donné ; l'œuvre prend le départ.
Dès le début les jeunes disent "Je vais au chantier". Pas besoin pour l'Abbé Poivrel de chercher un autre nom : "ce chantier était un chantier de bois ; cela sera le "Chantier" des âmes. Saint Joseph, travailleur et protecteur de l'enfance est choisi comme patron et l'étoile qui guida les Rois Mages, comme symbole de l'idéal chrétien.
L'ENVOL
Comme tous les patronages, le "Chantier" était plutôt destiné aux jeunes de condition modeste, mais il attirait aussi des fils de la bourgeoisie, contribuant ainsi à atténuer les préjugés de classe, très vifs à l'époque. Il apportait à tous une culture destinée à élever l'esprit, à développer l'intelligence, afin qu'ils puissent par eux-mêmes réussir leur avenir. Trois séances théâtrales étaient données chaque mois ! Les spectateurs étant si nombreux, il fallait jouer les pièces plusieurs fois pour accueillir tout le monde. Il est vrai que cinéma et télévision n'attiraient pas les foules à l'époque. Cela contribua grandement à la renommée de l'œuvre à l'extérieur. D'autant plus que, chaque vendredi, des conférences ouvertes à tous, sur les sujets les plus divers, assurées par des orateurs réputés, rencontraient la même audience.
Il y eut bientôt une Harmonie de soixante musiciens et une clique qui, à la demande de l'Hôtel de Ville, donnaient des concerts dans les kiosques à musique de la capitale. Puis une chorale et un orchestre furent montés, qui permirent d'interpréter de grandes œuvres classiques comme des opérettes en vogue à l'époque.
Diverses organisations d'ordre social virent le jour pour les familles, comme une centrale d'achats, des consultations juridiques, et même une tontine, etc.
L'ŒUVRE TRACE SON CHEMIN
On doit insister sur la constante affirmation du caractère chrétien du “Chantier”. Les solides structures, mises en place par son fondateur, permirent à l’œuvre de résister aux tempêtes de l’Histoire. D’abord la "Grande Guerre" de 1914 : quatre cents de ses membres participèrent aux combats, 133 furent tués, dont beaucoup étaient de ses piliers. Mais la paix revenue, l’Abbé Poivrel sut rassembler autour de lui toutes les énergies et le “Chantier” retrouva sa vitalité d’avant-guerre.
Jean Labbé, l’un des tout premiers inscrits de 1906, devint prêtre en 1932 et fut affecté sur place, comme aumônier. Par l’autorité que lui conféraient vingt-cinq années d’activité constante au “Chantier”, par son dynamisme exceptionnel, il contribua pleinement à l’épanouissement du patronage Il en devint Directeur en 1944, au décès du Père Poivrel, et le resta jusqu’en 1975. Il permit au “Chantier” de survivre à d’autres catastrophes : la crise économique des années 30 puis la Seconde Guerre Mondiale, pendant laquelle plus d’une centaine d’animateurs restèrent prisonniers en Allemagne. En 1945 libérés, ils reprirent le flambeau et le "Chantier" retrouva toute sa vigueur.
DANS LES ANNEES 50 LE "CHANTIER" EST RAYONNANT
Les effectifs croissèrent rapidement, l’Union Athlétique du “Chantier” fut présente sur tous les terrains sportifs avec notamment quelques vingt équipes de football qui remportèrent de nombreux succès, et des athlètes réussissant des performances de haut niveau.
Un deuxième centre de vacances fut ouvert dans la Drôme pour accueillir une cinquantaine de tout-petits, cela en dépit d’un environnement difficile, avec des familles de plus en plus dispersées, et parfois indifférentes aux valeurs chrétiennes.
Pourtant, après soixante-dix ans d’existence, l’œuvre allait affronter de nouvelles difficultés qui la mettaient en péril. En 1973, sous la présidence de Henri Belli, successeur de Robert Mouquet, elle était expropriée par la Ville de Paris pour faire place à un vaste programme de réorganisation de l'Est parisien (tunnels sous la gare de Lyon, réaménagements des quais, pont Charles de Gaulle…) et dut s’installer sur le quai de la Rapée. Progressivement, les locaux se trouvaient noyés au milieu des tours de bureaux et des échangeurs routiers. Si bien que les parents hésitèrent à envoyer leurs enfants vers un “Chantier” devenu géographiquement isolé. Puis l’Abbé Jean Labbé tombait malade et devait abandonner ses responsabilités. Une fois encore, les aînés serrèrent les rangs autour du plus fidèle d’entre eux, Jean Finjan, leur Secrétaire Général depuis 1936. En 1981, un autre ancien devint prêtre et reprit les rênes : l’Abbé Marc Constantieux. Pour redynamiser l’œuvre, il dut se résigner au transfert imaginé par Henri Belli vers l’adresse actuelle, dans les constructions neuves de la ZAC de Reuilly.
Ce fut l'œuvre de Roger Hauvette, Président de l'époque, pour qu'en Septembre 1993 commence une nouvelle tranche de vie de l'œuvre dans les magnifiques locaux du 24 rue Antoine-Julien Hénard.
L'Abbé Poivrel et l'Abbé Jean Labbé ont été nommés Chanoines et reçurent la Légion d'Honneur au titre de l'œuvre. En outre le "Chantier" a reçu plusieurs prix décernés par l'Académie Française et de nombreuses félicitations de personnalités françaises ou étrangères.
LE ROLE DES FAMILLES
Le fondateur ne concevait pas que l'on puisse éduquer des enfants sans une collaboration efficace et confiante des parents. Il créa donc une "Amicale des Aînés" qui compta rapidement cinq cents membres, dont la plupart étaient les pères des garçons du patro. Et une "Association des Mamans" qui réunit trois cents d'entre elles. Ces deux groupements étaient étroitement impliqués dans le fonctionnement de l'œuvre qui leur doit sa pérennité.
LES CENTRES DE VACANCES
Dès 1907, "Le Chantier" crée une colonie de vacances, initiative audacieuse à l'époque. Mais les congés payés n'existaient pas, c'était une chance pour bien des écoliers de ne pas traîner dans les rues pendant cette période de l'année. Une propriété fut donc achetée en Haute-Savoie, au bord du lac Léman. En 1913, les effectifs grandissant, le Père Poivrel achète Hermancia, Depuis lors, le "Chantier" y accueille dans les meilleures conditions, des enfants et des adolescents qui, non seulement y respirent le bon air dans un cadre exceptionnel mais y retrouvent leurs amis en partageant des activités variées. Ils sont moins nombreux de nos jours, les modes de vacances étant plus diversifiés à notre époque.
A l'été 2015 les jeunes, en Juillet, comme les anciens, le 15 Août, eurent le plaisir de fêter centième anniversaire de la première colo à Hermancia.
LA DIMENSION SPORTIVE
Le "Chantier" a toujours accordé une grande importance au sport, gage de santé physique et morale : il apporte le goût de l'effort, le courage, le désir de vaincre tout en respectant les autres, l'esprit d'équipe. Il est le complément à la formation intellectuelle.
Dès 1906, l'Union Athlétique du "Chantier" adhéra à la Fédération Gymnique et Sportive des Patronages de France qui a pris ultérieurement la dénomination de Fédération Sportive et Culturelle de France (FSCF). Sous l'impulsion de ses présidents successifs, René Merle et Robert Mouquet, l'UAC participa à la plupart des concours régionaux et nationaux organisés par cette Fédération.
On y pratiqua le cross, l'athlétisme avec succès. René Vandebeek fut champion de France du 400 m en 1913, membre de l’équipe de France du 4x400 m médaillé de bronze aux Jeux Interalliés en 1919, Marthe Lambert fut sélectionnée pour les JO de 1956 à Melbourne au 100 m haies. Nos équipes de relais ont toujours brillé dans le Championnat de France des Patronages principalement en 1952, 1953 et 1961 où nous avons remporté le titre. De nombreuses places d’honneur ont été enregistrées sur le plan individuel dans pratiquement toutes les générations.
On s'essaya à un sport en vogue à l'époque : "la savate", la boxe française dirions-nous maintenant. La section de gymnastique compta jusqu'à 300 membres, allant même jusqu'à se donner en spectacle tous les ans dans le stade vélodrome municipal dans le bois de Vincennes devant plusieurs milliers de spectateurs conquis. La section d'escrime fut plusieurs fois championne de France et un de ses membres, champion de Paris de fleuret, fut sélectionné pour les JO de 1928 à Londres.
Notre section football compta jusqu'à 20 équipes de football dans les années fastes. En 1955 et 1968, la première équipe du "Chantier" remporte le Coupe de France des Patronages contre des équipes renommées comme l’Arago d’Orléans, le Stade Brestois, Poitiers et l’intrépide d’Angers qui à l’époque évoluaient toutes en Championnat de France amateur ou en division d’Honneur de la FFF.
Notre section tennis, créée dans les années 70, se met en évidence dans les compétitions F.S.C.F., remportant régulièrement les Championnats de Paris, ayant de plus, accroché trois Coupes de France par équipe mixte, et une Coupe de France par équipe féminine ; mais également en compétition F.F.T. où nous figurons dans un tableau très honorable.
Notre équipe fanion en Tennis de table accéda dans les années 80/90 en National 2 de la FFTT… plus qu’une référence.
LA DIMENSION ARTISTIQUE
Dans les activités culturelles du “Chantier”, le Père Francis Poivrel, fondateur de l’œuvre, a voulu joindre très tôt un orchestre symphonique. Il y a 100 ans, l’apprentissage d’un instrument de musique par les jeunes était chose courante. Il réunit ainsi un ensemble de musiciens amateurs “maison” dont il confia la direction à Lucien Laguette. Maurice Girard, Richard Caramatti puis Guy Souchoy lui succédèrent. Depuis 2010 c'est Nicolas Janssens qui tient la baguette (Diplômé d’un Master 2 de musicologie et titulaire du CAPES de musique, Nicolas Janssens est également directeur musical en centre de vacances et dirige régulièrement des chœurs et orchestres de jeunes musiciens).
Dans les années 20, la Chorale fut créée, principalement pour accompagner les messes tant au “Chantier” qu’à la Paroisse Saint Antoine des Quinze-vingts. Elle a beaucoup évolué au fil des temps pour être dirigée, depuis 1981, par Patrick Le Mault.
Dans un souci d'épanouissement culturel, le théâtre a toujours été et reste, encore aujourd’hui, un grand contributeur des rendez-vous annuels de l’Association. Le “ Chantier ”, par ailleurs, s’est avéré être un vivier de talents dont certains sont allés plus loin professionnellement aussi bien dans l’écriture que dans le cinéma ou le théâtre.
Plusieurs metteurs en scène se sont succédés dans les années 20 à 60 comme Robert Mouquet, Jean Silvagnoli, Adrien Ménage, Jacques Proteau ou Andrée Pouly. Leurs productions très diverses répondaient en même temps à la préoccupation de l’ouverture culturelle et à la mission du divertissement familial.
Mais c'est incontestablement à partir des années 70 et sur la décennie 80 que le théâtre "Chantier" prend un nouvel essor avec la constitution d'une nouvelle compagnie que mène Colette Poinsenet. Sa mise en scène, empreinte de perfection, est le fruit d'un travail recherché dans une vision résolument de rupture avec le passé. Issue du Cours René Simon et du Conservatoire, elle insiste bien davantage, avec une exigence technique dans le jeu, sur les qualités humaines. Elle renouvelle la création des costumes, la conception des décors, des lumières et autres effets scéniques grâce aux talents conjugués d’une équipe technique rénovée. Elle redonne à la musique une place d'honneur y compris par la participation exceptionnelle et remarquable de ballets classiques ou de l'Orchestre Symphonique.
A la veille des années 90, Philippe Vialla, "élève" également de Colette Poinsenet, auteur, membre de la SACD, et metteur en scène, prend la relève. Évolution du temps, évolution du genre : avec la même rigueur et la même discipline de fond, il signe des mises en scène ingénieuses, relevant le défi d'adapter régulièrement pour le théâtre des romans ou des films.
Après la création des troupes de théâtre, de la chorale et de l’orchestre, il devenait tout à fait naturel de rassembler les divers artistes amateurs autour d’un livret et d’une partition d’opérette. Les jeunes, les aînés et les amis du "Chantier" se souviennent des moments inoubliables passés à répéter et produire ces œuvres du XIXe ou XXe siècle par lesquelles ils ravissaient les spectateurs. Pendant cette période et jusqu’en 1981, on a vu fleurir, chaque année, des livrets célèbres tels que “Hans le Joueur de flûte”, “les cloches de Corneville”, “François les bas bleus”, “la Fille du Tambour-major”, “la grande Duchesse de Gerolstein”, “les Saltimbanques”, “les Mousquetaires au Couvent”, “Au Soleil du Mexique”, “les Valses de Vienne”, “la Veuve joyeuse”…
A l’arrivée de Michèle Hénon, chanteuse lyrique et metteur en scène, les opérettes classiques, modernes et viennoises sont intercalées avec des revues thématiques mélangeant tous les genres : opérettes, opéras, comédies musicales, variétés, programme que continue Lucie Reichel qui préside maintenant aux destinées de la troupe.
LE CENTRE DE LOISIRS
Élément important de la vie de chaque enfant et pourtant, à notre époque si souvent associé à du temps perdu, le jeu sous toutes ses formes occupe une grande partie de nos journées.
Il est d’intérieur ou d’extérieur, avec ou sans matériel, individuel ou par équipe, en opposition ou en coopération, sportif ou artistique, intellectuel ou manuel.
C'est en jouant que l'on apprend à être solidaire, maîtriser son caractère, s'adapter aux règles, aux normes, s'adresser aux autres…
Que ce soit le Mercredi, le soir après l'école, pendant les petites vacances, "Le Chantier" est ouvert quand l'école ferme" pour y accueillir les enfants heureux d'y venir.
"ON JOUE, ON PRIE !"
ON JOUE, C'EST CE QUI EDUQUE POUR ETRE HOMME !
• Le jeu
• La vie de groupe
• La vie familiale autour des aînés
• Le sens de la communauté, …
Invitent au respect, au partage, à l'attention aux autres.
• Le sens de l'effort et de la compétition
• Le jeu, le sport, les loisirs
• L'art, la culture, l'étude, …
Cette formation humaine permet d'acquérir et de développer : la maîtrise de soi, le goût de l'effort, l'intérêt aux études, la loyauté, la patience, le sens de la justice, la force de caractère, l'adresse, la vivacité, l'énergie, les aptitudes artistiques …
ON PRIE, C'EST CE QUI FORME POUR ETRE CHRETIEN !
• Le catéchisme
• Les causeries spirituelles, l'éveil à la foi …
Font des chrétiens heureux de vivre et de communiquer l'Évangile.
• Les messes
• Les retraites et les récollections
• Les prières communes
• Les groupes de réflexions…
Approfondissent le don de Dieu et aident à la rencontre de Jésus Christ.
• Le service des autres
• Le service de l'autel,
• Les prises de responsabilités
• La charité vécue et partagée…
Font apprendre à donner ce que l'on a reçu dans un esprit de famille.
En dépit des difficultés rencontrées (augmentation des charges financières, exigences sans cesse renouvelées des contraintes d'encadrement, d'organisation, dispersion géographique des personnes, évolution des choix et modes de pratique sportives et de loisirs, …) "Le Chantier" reste confiant dans son avenir, persuadé que la fidélité aux valeurs érigées par ses fondateurs et successeurs, associées à une réelle envie de modernisation, sera porteuse de résultats toujours orientés au profit de la jeunesse.
Pour en savoir plus sur notre association, et découvrir comment participer activement à sa vie, cliquez sur les liens suivant :